Adoptée le 15 avril 2020 à l’occasion de la 47ème réunion du Bureau de l’AFAPDP
La situation dans laquelle se trouvent nos pays respectifs est inédite, c’est une menace pour la santé, la sécurité et le bien-être de tous les citoyens à travers le monde, y compris ceux de l’espace francophone et nous pouvons déjà constater le danger que la pandémie fait peser, en sus, sur les systèmes informationnels de nos Etats.
Les priorités actuelles de nos gouvernements sont de lutter contre la propagation du virus, soigner les malades et éliminer durablement le COVID-19. Nos États doivent accomplir ces missions en veillant au respect de la démocratie, de l’État de droit et des droits humains, y compris au respect de la vie privée et à la protection des données personnelles.
Dans ce contexte, toute mesure attentatoire aux libertés fondamentales et aux droits humains, qui serait envisagée, doit être strictement nécessaire, proportionnée et limitée en droit, dans l’espace et le temps.
Aujourd’hui, plus de la moitié de l’humanité est privée d’une liberté fondamentale, celle d’aller et de venir. Plus de la moitié de l’humanité a accepté qu’il soit porté atteinte, temporairement et de manière exceptionnelle, à cette liberté, pour sauver des vies.
Parmi les moyens utilisés ou envisagés dans la lutte contre la propagation du virus, certains reposent sur la collecte et le traitement de données qui peuvent revêtir un caractère personnel. Nous rappelons à ce titre que la collecte et le traitement des données à caractère personnel, dans le cadre de la lutte contre la propagation de l’épidémie de COVID-19 et de la recherche d’un traitement, doivent s’opérer dans le respect des exigences dictées par les instruments internationaux, régionaux et les législations nationales.
En particulier, la collecte et le
traitement de données personnelles qualifiées de sensibles par le législateur
doivent faire l’objet de précautions particulières. Les outils de traçage de
contact, par exemple, doivent s’inscrire dans des stratégies plus globales de
santé publique déterminées et précises. Au nom des principes démocratiques et
au nom de l’Etat de droit, il ne peut pas être porté atteinte, de manière
absolue et durable, au respect de la vie privée. A cet égard, la surveillance
de masse ne peut constituer le remède à tous les maux et elle est porteuse,
intrinsèquement, de risques majeurs pour nos sociétés.
Nous invitons les pouvoirs publics, les entreprises, les chercheurs et la société civile à panser nos plaies d’aujourd’hui sans risquer d’ouvrir d’autres blessures demain. Nous leur demandons de se limiter à des mesures nécessaires et proportionnées et de ne pas laisser de porte ouverte aux pratiques abusives ni aux discriminations.
Les défis liés à la protection des données personnelles et de la vie privée, à l’intégrité de l’information et à la sécurité du cyber espace, que nos autorités affrontent chaque jour, sont plus que jamais d’une importance capitale pour assurer le respect de l’Etat de droit et la résilience de nos démocratie en cette période. Aussi souhaitons-nous rappeler les nombreuses résolutions adoptées par l’Assemblée générale de l’AFAPDP ces dernières années, sur la transparence des pratiques de collecte de données à caractère personnel par les gouvernements (2013), sur la surveillance de masse ou encore sur la prise en compte des principes éthiques dans les traitements de données à caractère personnel dans le domaine de la santé et de la génétique (2015). Les principes contenus dans ces documents doivent continuer de guider nos travaux.
Nos autorités de protection des données personnelles ont pour missions de conseiller les pouvoirs publics et de protéger les droits et libertés des personnes. Nous continuons de veiller au respect des principes de nécessité et de proportionnalité et devons, en toute situation, agir avec toute l’étendue de nos moyens si d’éventuelles atteintes étaient constatées.